Mirage inférieur

Effet de la hauteur du point d'observation





Pour un mirage inférieur observé au-dessus de l'eau, le point d'observation habituel est au bord du rivage, à environ deux mètres au-dessus du niveau de l'eau pour un appareil photographique sur trépied. Si on s'élève beaucoup au-dessus de la couche de forte décroissance de la température, qui est située juste au-dessus de l'eau, l'effet disparaît. Les exemples suivants permettent de constater les différences d'aspect d'un mirage en fonction de la hauteur du point d'observation.


1. Les falaises de la Côte Basque

Sur la Côte Basque, des falaises du Crétacé plongent leurs strates dans l'Océan Atlantique entre Saint-Jean-de-Luz et Hendaye. Leur observation depuis Biarritz à deux hauteurs différentes au-dessus de l'eau permet de mettre en évidence l'effet de la hauteur du point d'observation. Les images 1.1 et 1.2 ont été réalisées le même jour à une distance d'une douzaine de kilomètres des falaises : l'image 1.1, avec mirage, a été effectuée entre 5 et 10 mètres au-dessus de l'eau alors que l'image 1.2, sans mirage, l'a été entre 30 et 40 mètres au-dessus du point d'observation de l'image 1.1. A cette altitude, la température suit son évolution normale et aucun mirage n'apparaît.


Les falaises de la Corniche basque depuis Biarritz
(juillet 2022)



1.1 Avec mirage, 5 à 10 m au-dessus de l'eau.


1.2 Sans mirage, 30 à 40 m au-dessus du point d'observation de l'image 1.1.


2. Le Sémaphore de Messanges (Landes)

Dans le département des Landes, le Sémaphore du village de Messanges est observable à des dizaines de kilomètres. Il s'élève au-dessus, de haut en bas, de la forêt de pins, de la côte sableuse et de l'océan. Son observation le même jour depuis deux sites proches l'un de l'autre, et situés à des altitudes différentes, permet de vérifier que le phénomène est vu différemment dans les deux circonstances. Ceci a été effectué deux fois, la première en janvier 2025 et la deuxième deux mois plus tard.

En janvier 2025, le Sémaphore de Messanges a été observé depuis l'esplanade du phare de Biarritz puis depuis un promontoire situé à Anglet à un intervalle de 11 minutes : depuis Biarritz, un mirage inférieur apparaît (image 2.1) alors que, depuis Anglet, le mirage est absent (2.2). Les deux sites sont séparés de 700 m et sont, respectivement, à 37.6 km et 37.4 km du sémaphore. Comme la situation sur chaque site n'était pas éphémère mais durable, c'est la différence d'altitude qui explique que le mirage soit visible depuis Biarritz et absent depuis Anglet : l'image 2.1 a été réalisée à une altitude de 33 m (altitude du site + hauteur de l'appareil photo) alors que l'image 2.2 l'a été depuis l'altitude de 48 m. Une différence de 15 m suffit donc pour affecter la visibilité du phénomène.

Cette double observation a été effectuée de nouveau en mars 2025 depuis les mêmes sites, avec un intervalle de 13 minutes entre les photographies 2.3 et 2.4. Le phénomène a pris une apparence différente entre l'observation depuis l'esplanade du phare de Biarritz et celle depuis le promontoire d'Anglet : un mirage était observable depuis Anglet (2.4) mais à une hauteur plus faible que depuis Biarritz (2.3). Ainsi, dans 2.3, l'image inférieure concerne des éléments situés au-dessus de ceux vus en double dans 2.4. Comme en janvier, c'est la différence d'altitude de 15 m entre les deux sites qui est responsable de cette différence.

Comme il n'est pas possible d'effectuer un positionnement absolu des photographies issues de ces deux sites, les images sont alignées approximativement au niveau de la jonction de la base du pylône avec la forêt de pins. Pour comparaison, une autre image réalisée à Biarritz en novembre 2024 permet de voir le site avec une situation atmosphérique standard.


Janvier 2025


2.1 Avec mirage, vu depuis l'altitude de 33 m à Biarritz.


2.2 Sans mirage, vu depuis l'altitude de 48 m à Anglet, à 700 m du site où a été réalisée l'image 2.1 11 minutes après.
Mars 2025


2.3 Avec mirage, vu depuis l'altitude de 33 m à Biarritz.


2.4 Avec un mirage différent, vu depuis l'altitude de 48 m à Anglet, à 700 m du site où a été réalisée l'image 2.3 13 minutes avant.


3. Le Mont Sollube (Espagne)

L'influence de la hauteur du point d'observation peut aussi être évaluée sur une échelle beaucoup plus faible, au niveau de la mer. Une telle observation a été effectuée un soir de septembre 2024 à Biarritz pour le Mont Sollube (683 m) situé à 98 km vers Bilbao. Les images 3.1 à 3.3 ont été réalisées sur la même plage à quelques mètres les unes des autres avec des hauteurs de l'appareil photographique au-dessus du niveau de l'eau à chaque fois différentes, et estimées ici de façon approximative. Le changement d'aspect n'est pas qu'un simple effet de perspective (plus on est haut, plus grande est la partie de la montagne qui est vue) car les caractéristiques du mirage (son extension verticale et la dépression de l'horizon) dépendent fortement de la hauteur par rapport au niveau de l'eau, bien que le mirage soit de faible amplitude.

Cet effet de la hauteur du point d'observation a été modélisé dans des situations variées par Eberhard Tränkle dans son article "Simulation of inferior mirages observed at the Halligen Sea"1. Il reproduit les variations d'aspect de plusieurs mirages inférieurs, dans leur forme classique ou dans des cas plus complexes, et détermine les profils de température correspondants.


Le Mont Sollube en Espagne, depuis Biarritz
(septembre 2024)



3.1 Hauteur de l'appareil photo au-dessus de l'eau : environ 1 m.


3.2 Hauteur : environ 2 m.


3.3 Hauteur :
3 à 4 m.


4. Mirage solaire inférieur

Dans les photographies 4.1 à 4.3, le mirage inférieur pour le Soleil est observé au niveau de l'eau, à une altitude d'environ 2 mètres, alors qu'en 4.4 il est vu depuis l'altitude de 49 m. Pour que la comparaison soit valide, les images sélectionnées correspondent toutes à l'instant où la jonction entre l'image supérieure et l'image inférieure se fait par un pont de lumière fin pour le liseré rouge. Certes, l'amplitude d'un mirage inférieur est variable d'un jour à l'autre mais, dans la photographie 4.4 (altitude 49 m), l'image inférieure inversée est beaucoup plus fine et plate que dans les trois autres images effectuées au niveau de l'eau. Cette caractéristique est causée précisément par la différence d'altitude entre les observations.

Sur son site https://aty.sdsu.edu, Andrew T. Young a réalisé des simulations de mirages inférieurs pour le Soleil en faisant varier la hauteur du point d'observation2, ce qui montre bien cet effet.



4.1 Lever du Soleil (Aude, janvier 2022).


4.2 Lever du Soleil (Aude, février 2022).


4.3 Coucher du Soleil (Pyrénées-Atlantiques, août 2024).


4.4 Coucher du Soleil (Pyrénées-Atlantiques, juin 2025).




Références :
1 : Eberhard Tränkle, Optics express, Vol. 5, No. 4, 16 août 1999
2 : Andrew T. Young, https://aty.sdsu.edu/explain/simulations/inf-mir/Omega.html#height




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